Il a le sens de la formule ce bâtard de Brel hein?! On en a tous dans notre entourage, quand bien même on a la chance (comme moi) que nos grands parents se soient déjà « endormis pour trop longtemps », ils sont tellement nombreux qu’on ne peut échapper à leur invasion qui sent le thym, la naphtaline et un peu la pisse aussi. Allez, rock on!
Tout d’abord, ils sont beaucoup trop lents. Lents sur tous types de terrains: terrain bitumeux, terrain herbeux, terrain terreux. Sur les trottoirs, non contents d’avancer à 0.83 km/h, ils adoptent des trajectoires aléatoires qui nous empêchent de les doubler d’un souple déhanché, presque arrogant devant ces tristes pantins arthrosés. Dans les commerces, ils aiment aller aux heures de pointe, pour se sentir moins seuls ou que sais-je encore, peut être le plaisir de faire slalomer kiki-avec-son-petit-manteau-matelassé entre les clients déjà à fleur de peau après une journée d’un travail fort ingrat et bien peu rémunérateur. A moins que ce soit l’irrésistible opportunité de casser les couilles tenir la jambe à un quelconque vendeur de chaussettes pendant un quart d’heure (qui lui paraîtra une éternité). Peu importe le sujet, tout est bon tant qu’on peut le transformer en un morne pot pourri de jérémiades et de complaintes inutiles. Le classique restant la météo, mais c’est loin d’être le seul! En effet, les vieux aiment beaucoup raconter que, en gros, c’était mieux avant. Et puis avec l’euro ma bonne dame, et avec le réchauffement climatique hein, ça y a plus d’saison, et puis avec internet maintenant les jeunes, ils ne savent plus s’amuser/communiquer/parler (bon, pour le dernier, je suis un peu d’accord). J’ai toujours un peu envie de leur répondre:
« Ecoute mamie, si c’était mieux avant, fallait penser à mourir avant que ça se gâte. »
Mais les vieux n’aiment pas mourir, c’est scientifiquement prouvé. A la place, ils préfèrent décrépir lentement, parce que ça leur donne une superbe occasion de se plaindre de leur état de santé!!! Je ne vois pas bien l’intérêt de vivre jusqu’à 120 ans si c’est pour en passer près de la moitié en déambulateur, cataracte turgescente et poche fécale au côté. Visiblement, les vieux croient (à tort!) que nous exposer leurs terribles souffrances quotidiennes les rend intéressants. Mais ce n’est parce qu’on compatit distraitement qu’on s’intéresse! A quoi bon nous raconter ça puisque nous ne sommes pas (à part quelques exceptions dont c’est le métier) aptes à trouver une quelconque solution à leurs problèmes..? Dans le meilleur des cas, ça nous déprime parce qu’on se dit qu’un de ses jours on va finir pareil, dans le pire ça nous donne juste envie de faire appel d’urgence à Euthanasor, qu’il achève leur souffrance (et la notre) d’un agile coup de cuiller à pot.
J’ai aussi remarqué quelques phénomènes propres au vieillissement. Déjà, on adopte obligatoirement l’allure vestimentaire du vieux, toutes saisons confondues (le vieux ne sentant plus les écarts de chaleur): pantalon en velours côtelé remonté à mi-poitrine, chemise terne boutonnée de pied en cape, veste de costume en tweed ou autre matière qui pique de préférence dans un joli camaïeu oscillant entre le jaune moutarde et le marron caca-en-spray et on complète avec une combo long manteau bien épais/casquette béret à la française. Une autre évolution implacable: l’haleine de cimetière. C’est assez notoire comme les hommes de plus de cinquante ans se transforment progressivement en gueules de renards musqués. Et physiquement, on observe aussi un léger tassement/voutement ainsi qu’une étrange croissance du nez et des oreilles, en gros ta face retourne à la case adolescence mais puissance trois. Après, de nos jours, ce n’est plus vraiment grave d’avoir le zob tout mou, donc je ne m’étendrai pas sur le sujet.
Moralité, le rapport avantages/inconvénients est quand même beaucoup trop déséquilibré pour que ce soit vraiment sympa de vieillir. A part la sagesse (et encore, c’est bien loin d’être systématique) et le fait de voir grandir ses petits enfants (et encore, les enfants, c’est très surfait), eh beh c’est pas joli joli… D’autant que j’aime pas trop trop la Suze et Laurent Romejko, alors la vieillesse, non merci.